Le pouvoir disciplinaire de l'employeur

Le chef d’entreprise a la faculté de sanctionner son salarié en cas d’irrespect de ses obligations contractuelles et de la discipline interne à l’entreprise.

La faculté de sanction d'un salarié

En vertu de son pouvoir disciplinaire, le chef d’entreprise a la faculté de sanctionner son salarié en cas d’irrespect de ses obligations contractuelles et de la discipline interne à l’entreprise. Néanmoins, pour pouvoir exercer pleinement ce pouvoir, l’employeur doit lui-même se conformer à certains principes notamment procéduraux sur lesquels nous allons revenir.

Élément constitutif et décisif du contrat de travail, le lien de subordination qui lie le salarié à son employeur se caractérise par « l’exécution d’un travail sous l’autorité de l’employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. » L’employeur dispose donc sur le salarié d’un pouvoir de direction et de contrôle et si besoin, de la faculté de sanctionner les agissements de son salarié qu’il considère comme fautif.

L’existence d’une faute professionnelle

Dans l'impossibilité de pouvoir appréhender toutes les situations considérées comme fautives tant les secteurs d’activité et les obligations contractuelles des salariés sont différents, le code du travail ne donne pas de définition de la faute. Seule l’administration a tenté de qualifier la faute comme « tout comportement ne correspondant pas à l’exécution normale de la relation contractuelle et qui se manifeste par un acte positif ou une abstention de nature volontaire. » La qualification de la faute professionnelle relève donc de l’employeur seul : c’est l’employeur qui déterminera si tels actes ou abstentions correspondent à une faute professionnelle à ses yeux. C’est uniquement en cas de contestation de la part du salarié que le juge viendra finalement contrôler si les faits reprochés étaient de nature à justifier réellement ou non une sanction.

Le règlement intérieur (obligatoire à partir de 20 salariés et de 50 salariés à compter du 1er janvier 2020) et qui vise à consigner par écrit les règles générales et permanentes de discipline applicables dans l’entreprise est un support utile à l’employeur pour qualifier une faute. En effet, le règlement intérieur permet de porter à la connaissance de chacun des salariés les règles de discipline interne et d’établir ainsi plus facilement la réalité de la faute professionnelle. Même si les formalités de mise en œuvre d’un règlement intérieur peuvent paraître fastidieuses, les entreprises de moins de 20 salariés (moins de 50 salariés au 1er janvier 2020) peuvent donc avoir un intérêt certain à sa rédaction et à sa mise en place.

En dehors de textes légaux qualifiant précisément la faute professionnelle ou de règlement intérieur, la faute sera caractérisée dès lors que le salarié ne respecte pas une obligation découlant de son contrat de travail.

Un fait de la vie personnelle ne pourra constituer une faute professionnelle.

Gravité de la faute professionnelle

L’employeur va apprécier la gravité de la faute et mettre en œuvre la sanction appropriée. Il est à noter qu'en cas de contentieux, il appartiendra au Juge de qualifier la faute, indépendamment de la qualification retenue par l'employeur.

Il existe trois types de fautes :

La faute “légère” : Il s’agit d’une faute qui n’est pas susceptible de rendre impossible le maintien des relations contractuelles. Elle justifie néanmoins la notification d’une sanction disciplinaire autre qu’un licenciement (avertissement, mise à pied disciplinaire…).

  • La faute “sérieuse” ou faute “simple” : il s’agit d’une faute suffisamment sérieuse pour rendre impossible la poursuite de la relation contractuelle mais qui n’impose pas pour autant la rupture immédiate du contrat et la privation pour le salarié de son droit à préavis et indemnité de rupture.
  • La faute “grave” : Elle correspond à une faute qui rend impossible le maintien du contrat de travail et ce, même pendant le préavis. Elle est privative pour le salarié du préavis et de l’indemnité de licenciement.
  • Faute “lourde” : il s’agit d’une faute d’une exceptionnelle gravité relevant d’une intention de nuire du salarié à l’employeur. Elle est privative du préavis, de l’indemnité de licenciement. La détermination du degré de la faute est donc une étape importante pour l’employeur puisque de cette appréciation dépendent le choix de la sanction et la procédure à mettre en œuvre.Plusieurs facteurs permettent de qualifier la faute et il est nécessaire de les mettre tous en exergue. La nature des faits reprochés (sommes volées insignifiantes…), la situation professionnelle du salarié (ancienneté, niveau de responsabilité, expérience, antécédents disciplinaires…) sont des éléments à prendre en compte avant toute décision de sanction. Le chef d’entreprise devra considérer également la situation de l’entreprise (usages dans la profession, activité en contact avec la clientèle, activité soumise à des consignes strictes de sécurité…) et les conséquences préjudiciables de la faute (dommages causés ou potentiels …).

La preuve et prescriptions des fautes

Le motif invoqué par l’employeur doit être vérifiable et il lui revient d’apporter la preuve de la réalité du motif. Si la preuve de la faute peut être fournie par tous moyens (attestation écrite, témoignages…), elle ne doit pas avoir été recueillie par des moyens frauduleux ou des procédés portant atteinte aux droits du salarié et à ses libertés individuelles. De même, l’employeur ne peut pas recourir à des dispositifs clandestins de contrôle de l’activité de ses salariés.

Exemple : En matière de vidéosurveillance,le dispositif devra avoir fait l’objet préalablement d’une information des salariés et des déclarations auprès des administrations compétentes le cas échéant (préfecture) et être conforme au RGPD (règlement européen sur la protection des données) si le système enregistre et conserve les images. À défaut d’information préalable du salarié visé, la preuve ainsi collectée sera jugé illicite et irrecevable.

Prescription des fautes

L’employeur a deux mois à compter du jour où il a eu connaissance des faits fautifs pour engager des poursuites disciplinaires. Passé ce délai de deux mois, le chef d’entreprise ne pourra plus sanctionner.

Le choix de la sanction

Après avoir déterminé le degré de la faute commise par le salarié, et recueilli le cas échéant les explications du salarié lors d’un entretien préalable, l’employeur décidera seul de la sanction qu’il souhaite notifier. En cas de contestation, le juge prud’homal appréciera la proportionnalité de la sanction prononcée par l’employeur au regard des faits commis. L’éventail des sanctions est multiple :

  • L’avertissement : il s’agit d’une sanction dite mineure qui ne nécessite pas de procédure particulière hormis celle de notifier par écrit les faits reprochés au salarié.
  • La mise à pied disciplinaire : elle correspond à une mesure de suspension provisoire du contrat de travail pendant laquelle le salarié n’exécutera pas sa prestation de travail et ne sera pas rémunéré. La notification d’une telle sanction nécessite la convocation à un entretien préalable au cours duquel le salarié pourra se faire assister par un autre salarié de l’entreprise.
  • Le licenciement disciplinaire : il s’agit d’une mesure qui entraînera la rupture du contrat de travail. L’employeur optera pour le licenciement pour faute réelle et sérieuse, faute grave ou lourde selon le degré de gravité de la faute qu’il aura apprécié auparavant. Le licenciement est lui aussi toujours précédé d’une convocation et d’un entretien préalable. Le salarié pourra se faire assister par un membre du personnel voire par un conseiller du salarié, extérieur à l’entreprise si l’entreprise ne dispose pas de représentant du personnel.

L’employeur doit veiller à proscrire toute sanction discriminatoire et pécuniaire (exemple : retenue sur salaire ou suppression d’une prime pour un salarié qui aurait eu un accident de la circulation avec le véhicule de fonction de l’entreprise). De même, il doit veiller à ne pas sanctionner deux fois les mêmes faits fautifs. En revanche, en cas de réitération de nouveaux faits fautifs, l’employeur pourra décider de sanctionner à nouveau, au besoin de manière plus sévère. Attention cependant car le code du travail prohibe toute nouvelle sanction faisant référence à des sanctions ayant une antériorité de plus de trois ans.

C’est parce que le juge judiciaire pourra contrôler l’exercice du pouvoir disciplinaire de l’employeur qu’il convient, avant d’engager une procédure, de réaliser une étude globale et exhaustive du dossier. Le recours à l’assistance d’un professionnel permettra à l’employeur de s’assurer qu’il notifie, de manière régulière, une sanction justifiée et proportionnée à la faute commise par le salarié.

 

 

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