Créances clients : quand les déprécier, quand les constater en perte ?

Sous quelles conditions une créance client doit elle être dépréciée ou constatée en perte lorsque son recouvrement est compromis ?

Une entreprise qui réalise des ventes ou des prestations de services au bénéfice d’autres professionnels est tenue d’établir et de délivrer une facture à ses clients. Lorsqu’elle réalise une prestation de services au bénéfice de particuliers pour un montant supérieur à une certaine limite (actuellement 25 €), elle est tenue de délivrer une note.

Vous pouvez consulter notre article « Délivrer une facture »  pour revoir les principales obligations relatives à l’établissement des factures.

Dans certaines activités, ou vis-à-vis de certains clients, il peut être d’usage, ou il peut être convenu, d’accorder un délai plus ou moins important pour le règlement des factures.

Au bilan d’une entreprise, les factures restant à encaisser à la clôture d’un exercice sont présentées avec les créances, à l’actif, et constituent le poste « Clients ».

Le chef d’entreprise, ou son responsable administratif, doit s’assurer très régulièrement de leur correct règlement aux échéances convenues, et relancer sans attendre les clients retardataires. L’accumulation des impayés clients est un risque pour une entreprise, et plus le temps passe, plus le risque de non recouvrement des factures non encore encaissées s’accroit.

Cette démarche est d’autant plus nécessaire à l’heure où les retards de paiement se sont rallongés en raison de la crise sanitaire.

Vous pouvez consulter notre article « Un client ne vous paie pas » pour connaître les premières mesures de relance à mettre en œuvre.

Mais une relance adressée à un client retardataire n’aboutit pas toujours à un règlement.

Lorsque le recouvrement de la créance détenue à son égard est compromis, partiellement ou en totalité, soit parce qu’il connaît des difficultés financières, soit parce qu’il existe un litige non résolu sur la vente ou la prestation réalisée, on parle alors de créance douteuse et l’entreprise doit s’interroger sur la nécessité de la déprécier.

Si le client s’avère totalement défaillant, la créance détenue à son égard devient alors irrécouvrable et doit être traitée comme telle en comptabilité.

 

Constatation du caractère douteux de la créance

A la clôture d’un exercice, les créances ayant un caractère douteux en raison des difficultés financières du client ou en raison de l’existence d’un litige non résolu, sont tout d’abord « isolées » dans un compte spécifique « Clients douteux ou litigieux » (article 944-41 du PCG).

 

Dépréciation des créances clients lorsqu’elles s’avèrent douteuses

Toujours à la clôture de l’exercice, des dépréciations sont comptabilisées (on emploie également l’ancien terme de « provision ») afin de ramener le montant des créances douteuses aux montants qui seront probablement perçus par l’entreprise (article 214-25 du PCG). Les dépréciations sont constatées en contrepartie d’une charge de l’exercice (« Dotation pour dépréciation des créances »). Elles correspondent à la fraction des créances douteuses dont le recouvrement est compromis.

Remarque : pour les entreprises soumises à TVA, il est d’usage de comptabiliser les dépréciations sur la base des montants hors taxes des pertes probables, partant du principe que si tout ou partie des créances concernées s’avèrent définitivement irrécouvrables, la TVA antérieurement versée sur ces opérations sera imputable sur les montants dus ultérieurement ou sera restituée, et donc ne sera pas perdue.

 

Traitement fiscal des dotations pour dépréciation des créances clients

Les « Dotations pour dépréciation des créances » sont fiscalement déductibles des résultats de l’entreprise, sous réserve de respecter trois conditions.

  • 1ère condition : la créance et sa dépréciation doivent être inscrites en comptabilité

Cette condition est obligatoirement satisfaite par les entreprises qui tiennent une comptabilité commerciale (les prestataires de services, les entreprises de production, etc).

Par contre, les professionnels libéraux dont les résultats sont déterminés en fonction des recettes encaissées et des dépenses payées (comme par exemple un architecte qui exerce à titre individuel), ne peuvent pas déduire de montants correspondant à des dépréciations, car les factures non encore réglées par leurs clients ne sont pas prises en compte pour la détermination de leur résultat.

  • 2ème condition : des évènements en cours à la date de clôture de l’exercice doivent rendre probable la perte envisagée

Les difficultés financières du débiteur qui compromettent le recouvrement des factures restant à encaisser, doivent être avérées au plus tard à la date de clôture de l’exercice pour que la dépréciation constatée soit déductible. Si ces difficultés sont nées après la date de clôture de l’exercice, la dépréciation n’est pas fiscalement déductible.

Il en est de même en en ce qui concerne les motifs de non résolution des litiges.

Cette différence d’appréciation de date constitue une divergence entre les règles comptables et les règles fiscales.

  • 3ème condition : le risque de non recouvrement des créances doit être nettement précisé

Il appartient à l’entreprise de préciser les créances qui font l’objet d’une dépréciation (notamment en les comptabilisant dans le compte spécifique « Clients douteux »), et d’être en capacité de justifier, créance par créance, les motifs qui les rendent douteuses.

Sauf cas particulier, les dépréciations déterminées globalement, de manière statistique, ne sont pas fiscalement déductibles.

En pratique, pour que la déductibilité de la dotation pour dépréciation d’une créance soit admise,

  • l’entreprise doit avoir réalisé des diligences pour le recouvrement de cette créance (mise en œuvre de procédures de relance, voire engagement de poursuites) ;
  • ces diligences doivent s’être avérées infructueuses,
  • et il doit exister un risque d’irrécouvrabilité pour des raisons telles que, par exemple, la situation financière notoirement difficile du client et le caractère probable de son insolvabilité, ou l’ouverture d’une procédure de sauvegarde ou de redressement à son encontre.

 

Le seul fait que le client concerné soit un « mauvais payeur » ne suffit pas à justifier du caractère déductible d’une dépréciation.

 

Ajustement ultérieur des dépréciations constatées

A la clôture de chaque exercice, les dépréciations constatées lors des exercices précédents sont ajustées en fonction d’une actualisation du degré de risque de non recouvrement des créances dépréciées.

La dépréciation d’une créance est augmentée, par la comptabilisation d’une charge complémentaire (« Dotation pour dépréciation des créances »), lorsque son risque de non recouvrement s’est accru. A l’inverse, la dépréciation est réduite voire annulée, par la comptabilisation d’un produit (« Reprise sur dépréciation des créances »), lorsque son risque de non recouvrement a diminué voire disparu.

Constatation des créances clients irrécouvrables

Une créance est irrécouvrable lorsqu’elle est définitivement perdue.

Le caractère définitif de la perte résulte de circonstances de faits, tels que, par exemple, l’épuisement de toutes les voies de recours à l’encontre du client, la disparition du client suite à la clôture de sa liquidation. A l’inverse, la seule ancienneté d’une créance ne suffit pas à démontrer son caractère irrécouvrable.

Sur le plan comptable, la créance est sortie de l’actif par la constatation d’une charge (« Perte sur créance irrécouvrable »).

Si cette créance avait fait l’objet antérieurement d’une dépréciation, cette dernière est annulée par la constatation d’une « Reprise sur dépréciation des créances ».

Remarque : pour les entreprises soumises à TVA, la perte est constatée hors taxes car la TVA antérieurement versée sera imputable sur les montants dus ultérieurement ou sera restituée.

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