Professionnels : le défaut de vigilance peut vous rendre solidaires du paiement des dettes fiscales de votre sous-traitant

Le travail dissimulé est l’une des bêtes noires des pouvoirs publics. L’employeur indélicat fait bien évidemment l’objet de sanctions importantes. Mais le Code du travail contient également des mesures destinées à dissuader les entreprises clientes de travailler avec lui. Ces mesures visent aussi à préserver les intérêts financiers des organismes de protection sociale en instituant des cas de solidarité des dettes sociales.

Le Trésor public n’est pas en reste. La constatation d’une infraction de travail dissimulé chez un sous-traitant peut également conduire l’entreprise donneuse d’ordre à être solidairement responsable d’une partie des dettes fiscales de ce prestataire si elle a manqué à son obligation de vigilance.

L’obligation de vigilance prévue par le Code du travail

Le Code du travail impose, entre autres obligations, un devoir de vigilance au donneur d’ordre.

Ce texte indique que tout professionnel qui conclut un contrat en vue de l’exécution d’un travail, de la fourniture d’une prestation de services ou de l’accomplissement d’un acte de commerce doit se faire remettre deux documents par son contractant :

  • une attestation (de vigilance) délivrée par l’organisme de protection sociale en charge du recouvrement (l’URSSAF en général). Ce document confirme que le prestataire satisfait à ses obligations de déclaration et de paiement en matière sociale ;
  • un document confirmant l’immatriculation du prestataire (à chaque fois que celle-ci est requise). Il s’agira bien souvent d’un extrait Kbis ou d’un document commercial sur lequel figurent des informations similaires.

Attention : obtenir l’attestation de vigilance ne suffit pas. L’entreprise donneuse d’ordre doit également vérifier l’authenticité du document. Elle doit le faire par voie dématérialisée auprès de l’organisme de protection sociale qui l’a délivré.

Par mesure de simplification, le donneur d’ordre est dispensé de cette obligation de vigilance si le contrat est d’un montant inférieur à 5 000 € (attention à l’appréciation de ce seuil en cas de prestations répétées ou successives).

Enfin, pour les contrats dont l’exécution s’étale sur de longues durées, l’attestation doit être renouvelée au bout de 6 mois.

La conséquence du défaut de vigilance

Si le donneur d’ordre n’a pas respecté son obligation de vigilance, et que son sous-traitant fait l’objet d’un procès-verbal pour travail dissimulé, il devient solidaire du paiement des dettes sociales de ce dernier.

Mais cela va plus loin, le Trésor public souhaitant également préserver ses intérêts financiers.

Les rédactions combinées du Code du travail et du Code général des impôts étendent cette solidarité au paiement des impôts et taxes dus par ce sous-traitant.

Cette solidarité vise non seulement l’impôt proprement dit mais également les pénalités et les majorations appliquées au prestataire.

Ainsi, le donneur d’ordre peut, par exemple, se trouver astreint à payer une partie de la TVA que le sous-traitant n’a pas reversée et les éventuelles majorations dont il est alors invariablement redevable.

Le donneur d’ordre reçoit un avis de mise en recouvrement

L’agent qui opère le contrôle social du sous-traitant va avoir la charge d’identifier les donneurs d’ordre qui n’ont pas respecté leur obligation de vigilance et d’établir leur manquement.

Puis, l’administration fiscale va prendre le relais en adressant un avis de mise en recouvrement au donneur d’ordre.

Cet avis précise la nature et le montant des impôts et taxes dont il est redevable.

Le Code du travail précise néanmoins que la solidarité du donneur d’ordre ne s’applique pas sur la totalité des dettes fiscales du prestataire.

Il n’est redevable de ces impôts et taxes qu’au prorata des travaux et des prestations réalisés pour son compte.

Par exemple, un donneur d’ordre dont les travaux représentent 19 % du chiffre d’affaires du prestataire, pourra se voir réclamer 19 % de ses dettes fiscales.

Bien évidemment, le donneur d’ordre peut contester l’imposition mise à charge au titre de cette solidarité. S’agissant de dettes fiscales, la juridiction compétente sera le Tribunal administratif, juge de l’impôt.