Temps partiel – Requalification en un contrat à temps plein – Délais

On doit retenir le fait qu’un salarié à temps partiel ne peut pas atteindre la durée légale de travail à temps plein (35 heures par semaine), par le recours à des heures complémentaires ou dans le cadre d’un avenant temporaire.

Cette règle est posée à l’article L 3123-9 du Code du travail qui indique clairement que « Les heures complémentaires ne peuvent avoir pour effet de porter la durée de travail accomplie par un salarié à temps partiel au niveau de la durée légale du travail ou, si elle est inférieure, au niveau de la durée de travail fixée conventionnellement ».

Que se passe-t-il si cette règle n’est pas respectée ?

Dans cette hypothèse, s’ouvre alors le risque d’une demande du salarié de voir son contrat de travail requalifié à temps plein.

Bien que cette demande de requalification puisse être engagée en cours d’exécution du contrat de travail, il est fréquent qu’elle survienne à l’issue du contrat de travail avec, de surcroît, une demande de rappel de salaire liée à la requalification.

Dans ce cas, la demande de requalification s’accompagne d’un rappel de salaire sur la base d’un temps plein à compter de la date où les règles du temps partiel n’ont plus été respectées.

Peu importe la durée de ce dépassement. Il suffit que la durée légale du travail soit atteinte même sur un seul mois isolé. Il en a été d’ailleurs décidé ainsi par la Cour de cassation dans une de ses décisions en date du 12 mars 2014 (n° 12-15014).

Pendant combien de temps peut agir un salarié ?

L’action en requalification est soumise à un délai de prescription de 3 ans.

Toute la question est alors de savoir quelle date ou évènement doit-on retenir afin d’examiner si la demande d’un salarié est prescrite ou non.

 

Dans une affaire présentée devant la Cour de cassation, deux thèses s’opposaient.

En effet, un salarié embauché dans une entreprise à temps partiel à raison de 8 heures par semaine (soit 34,67 heures en moyenne par mois), avait été amené à travailler près de 182 heures (soit bien au-delà de la durée légale de travail de 151,67 heures) au cours du mois d’août 2013.

Licencié en décembre 2015, le salarié saisit le Conseil de Prud’homme en décembre 2016.

Pour l’entreprise, l’action du salarié était prescrite dans la mesure où, ayant dépassé la durée du travail en août 2013, c’est à compter de cette date que le délai de 3 ans devait se décompter.

Pour l’employeur, le salarié aurait dû engager son action avant août 2016, ce qu’il n’a pas fait. Pour faire simple, du point de vue de l’employeur, le délai de 3 ans se déclenchait à la date à laquelle l’infraction a été commise étant ainsi en corrélation avec les faits vis-à-vis du salarié.

Devant la Cour d’appel, cet argument n’a pas été reçu et les juges ont requalifié le contrat en temps plein avec un rappel de salaires de novembre 2013 à décembre 2015.

L’employeur s’était alors pourvu en cassation.

Après avoir rappelé le principe de la prescription triennale, la Cour de cassation, dans une de ses décisions en date du 9 juin 2022 (décision n° 20-16992), confirme la décision de la juridiction d’appel.

En effet, pour la Cour, le point de départ du délai de prescription de l’action n'est pas la date de l’irrégularité invoquée par le salarié afin de demander le rappel de salaires, mais la date d'exigibilité de ces derniers.

Aussi, pour la Cour, il est légitime de retenir comme l’a fait la Cour d’appel, la date de novembre 2013, soit moins de 3 ans avant la rupture du contrat de travail.

Le salarié pouvait donc se prévaloir du dépassement de la durée légale de travail à compter du mois de septembre 2013 pour prétendre au paiement d'une rémunération sur la base d'un temps plein. À noter que dans cette affaire, l’employeur a été condamné à un rappel de salaires d’un montant de 46 976,55 € bruts au titre du rappel de salaires de novembre 2013 au 16 décembre 2015 ainsi qu’au paiement des congés payés afférents.

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