Comment se répartissent les travaux entre bailleur et locataire ?
La loi ne donne pas de liste précise de la répartition des travaux concernant les baux commerciaux, y compris lorsqu’ils comportent une partie habitation. Ce sont les juges qui ont tenté de clarifier les indications du législateur et des cocontractants.
Travaux d’entretien courant : à la charge du locataire, sauf clause contraire
Le locataire est tenu d’entretenir les lieux. Il est responsable de l’entretien courant de l’immeuble et des menues réparations. Cela consiste pour lui à prendre soin au fil des jours des locaux pour éviter qu’ils se dégradent : nettoyer de façon à assurer l’hygiène et la propreté, faire quelques raccords de peinture ou de papiers peints, encaustiquer, revernir, changer quelques petites pièces (par exemple, joints, écrous, brise-jet…). Le locataire n’est donc légalement tenu qu’à des travaux peu importants.
À noter : le défaut d’entretien par le locataire peut être une cause de résiliation du bail.
Néanmoins, le bail peut expressément mettre ces travaux à la charge du bailleur.
Attention, la loi impose au locataire de restituer le local en bon état de réparations locatives, sauf si un état des lieux initial a été établi : ne négligez pas cette formalité obligatoire !
Vétusté, force majeure et mise en conformité : à la charge du bailleur, sauf clause contraire
Au contraire, tout ce qui est lié à la vétusté ou à la force majeure est en principe à la charge du propriétaire : remplacement de la chaudière ou de la climatisation si elle est vétuste, enlèvement des graffitis, désamiantage, traitement anti termites…
La vétusté est appréciée en fonction de l’état des locaux lors de l’entrée dans les lieux ainsi que de la durée de la location : soyez vigilant lors de l’établissement de l’état des lieux entrant car il peut constituer une preuve à double tranchant !
À noter : le locataire qui a pris des locaux dans un état vétuste peut être tenu responsable de l’aggravation de la vétusté, si celle-ci résulte entièrement du défaut d’entretien de sa part. Dans ce cas, les réparations lui incombent.
Mais le bail va souvent plus loin et impose au locataire des réparations qui incombent normalement au bailleur. C’est ainsi qu’il peut mettre à la charge du locataire toutes les réparations, qu’elles soient dues à la vétusté ou non. Dans ce cas, cela a dû être pris en compte dans la fixation du loyer.
Les travaux de mise en conformité (normes de sécurité électriques, de gaz, accessibilité au public…), ou plus généralement ceux imposés par l’autorité publique (ravalement de façade, travaux d’assainissement…) incombent au bailleur. De plus, le bailleur qui loue des locaux pour une activité particulière (hôtellerie, boulangerie, restaurant…) doit délivrer des locaux conformes aux normes prévues pour cette activité, même si cela implique des travaux. Cependant, une clause expresse, claire et précise du bail peut prévoir que ces travaux reviennent au locataire, à condition qu’elle ne décharge pas le bailleur de son obligation de délivrance.
Important : les clauses reportant sur le locataire les travaux normalement à la charge du bailleur s’interprètent strictement, ce qui est généralement favorable au locataire.
Grosses réparations ou gros entretien : à la charge du bailleur
En ce qui concerne les grosses réparations relevant de l’article 606 du Code civil, même dues à la vétusté ou à la mise en conformité, elles sont à la charge du bailleur : murs, verrières, portes et fenêtres, charpente et toiture, étanchéité, remplacement total de l’ascenseur, gros œuvre, plancher ou plafond…
Pour les baux conclus ou renouvelés depuis le 5 novembre 2014, la loi interdit de les mettre à la charge du locataire, ainsi que les honoraires liés à leur réalisation. Il n’existe que deux exceptions :
- Le cas où les grosses réparations résultent du défaut d’entretien par le locataire, depuis le début du bail.
- Et celui où le bail est en fait une convention d’occupation précaire.
Le bailleur peut-il effectuer des travaux dans les locaux loués pendant le bail ?
En raison de son obligation de garantir la jouissance paisible des lieux, le bailleur n’a en principe pas le droit d’effectuer des travaux d’aménagement ou d’amélioration dans les locaux pendant la durée du bail commercial. Toutefois, les clauses autorisant les travaux (clauses de souffrance) sont fréquentes.
De plus, le bailleur a le droit d’effectuer des réparations urgentes ne pouvant attendre la fin du bail. Toutefois, si ces réparations durent plus de vingt et un jours, une diminution de loyer vous sera due.
En pratique, lors de la signature d’un bail conclu depuis le 1er septembre 2014, puis tous les trois ans, le bailleur doit communiquer à son locataire un état prévisionnel des travaux qu’il envisage de réaliser dans les trois années suivantes. Il doit être accompagné d’un budget prévisionnel, ainsi que d’un récapitulatif des travaux réalisés dans les trois années précédentes, précisant leur coût.
Conseil : l’état prévisionnel des travaux est souvent oublié lors de la révision triennale. Pensez à le réclamer !
Le locataire a-t-il le droit de faire tous les travaux ?
Le locataire n’a pas besoin d’obtenir une autorisation de son bailleur avant de faire exécuter les travaux d’entretien et les réparations locatives qui lui incombent.
En revanche, toutes les autres réparations doivent faire l’objet d’une autorisation préalable du bailleur. À défaut, le locataire qui a, de sa propre initiative, décidé d’exécuter des réparations à la place du bailleur, ne peut pas ultérieurement le contraindre à lui rembourser les dépenses engagées.
Dans l’hypothèse où les locaux ont besoin de travaux urgents, vous devez donc préalablement informer et mettre en demeure votre bailleur de les exécuter. À défaut de réaction de sa part, il faut que vous saisissiez le tribunal judiciaire pour :
- être autorisé à réaliser vous-même les travaux, moyennant une compensation sur les loyers,
- ou demander au juge que votre bailleur soit contraint, sous astreinte, à entreprendre les travaux.
Conseil : avant d’entamer des travaux, renseignez-vous sur le contenu du règlement de copropriété. De plus, si les travaux touchent aux parties communes, une autorisation préalable de l’assemblée des copropriétaires est requise.
Quelle est l'incidence des travaux sur le montant du loyer ?
En principe, si les travaux qui ont été réalisés augmentent la valeur locative, ils peuvent entraîner lors du renouvellement du bail une hausse du loyer tenant compte de l’exécution des travaux.
Mais pour que le propriétaire puisse faire valoir les améliorations apportées, il doit en avoir assuré la charge, soit directement (remboursement au locataire), soit indirectement (réduction de loyer). À défaut, il ne sera tenu compte de ces améliorations qu’à l’occasion du second renouvellement qui suit la réalisation des travaux.
En conclusion...
La question de la répartition des travaux et des réparations entre bailleur et locataire dans les baux commerciaux est complexe. En cas de conflit, la formulation de la clause du bail, ainsi que l’état des lieux seront déterminants. C’est pourquoi l’assistance d’un avocat spécialisé est vivement conseillée, tant pour la rédaction et la signature du bail commercial, qu’en cas de litige.