Pharmacie : les enseignements de la marge brute

Pour le Quotidien du Pharmacien, Philippe Becker et Christian Nouvel, de FIDUCIAL, décomposent tous les éléments que livre la marge brute sur l’activité officinale et, de manière plus générale, sur la réforme de la rémunération des pharmaciens.

Le Quotidien du pharmacien. - Votre étude fait ressortir un paradoxe : la marge brute baisse en proportion du chiffre d’affaires mais augmente en valeur absolue. Comment expliquez-vous ce phénomène ?

Philippe Becker. - Tout d’abord il faut rappeler que la marge brute est la somme de la marge commerciale et des honoraires, de la ROSP et de prestations diverses. Cet indicateur est dorénavant l’un des plus suivis car il rend compte de l’impact des réformes portant sur la rémunération du pharmacien. Il est important de préciser qu’il s’agit d’une marge brute qui agrège les activités remboursables, non remboursables et la parapharmacie.

Concernant le paradoxe que vous soulignez, il s’explique par la poussée des médicaments chers à plus faible marge qui, mécaniquement, font baisser le ratio marge brute sur CA HT. Corrélativement, l’activité progressant, la marge additionnelle, même plus faible, fait évoluer favorablement la valeur absolue.

Pouvez-vous chiffrer cette croissance ?

Philippe Becker. - Selon notre étude, la marge brute passe de 492 000 euros en 2018 à 498 000 euros en 2019, donc plus 6 000 euros, soit une hausse de +1,22 %.

On peut par conséquent conclure que les dernières modifications de la convention pharmaceutique n’ont pas affecté la marge brute…

Christian Nouvel. - C’était une crainte qui avait été exprimée ! Il faut noter, toujours selon notre étude, que cette crainte n’était pas fondée ; reste que la hausse de +1,22 % permet tout juste de couvrir l’accroissement des coûts fixes dans la plupart des officines.

En ce qui concerne le taux de marge brute rapportée au chiffre d’affaires hors taxes, constate-t-on en 2019 des différences selon les typologies d’officines ?

Philippe Becker. - Non il n’y a plus les différences marquées qui existaient antérieurement à la réforme de la rémunération officinale. Le chiffre pivot est aux alentours de 31 % du CA HT. Comme l’an dernier, les officines rurales se placent en tête du fait d’une moindre concurrence sur les produits à marge libre mais l’écart avec les pharmacies de centre-ville n’est que d’un point.

Comment ont évolué les honoraires et autres rémunérations en 2019 ?

Christian Nouvel. - Nous observons sans surprise une augmentation de la part des honoraires et autres rémunérations. Sur l’ensemble de la population décrite, les produits hors ventes passent annuellement de 136 000 euros à 159 000 euros, soit + 17 %. Il faut toutefois considérer que la progression se situe essentiellement sur les honoraires. Les rémunérations sur objectifs ne progressent plus et les rémunérations sur services (hors activité HAD et MAD) représentent encore un chiffre marginal de l’ordre de quelques milliers d’euros par officine.

C’est pourtant la rémunération du futur !

Philippe Becker. - Nous sommes bien d’accord sur ce point : il faudra revaloriser la rémunération de ses services à forte valeur ajoutée dans les toutes prochaines années pour que cela décolle vraiment. Ces services réclament des moyens humains et matériels lorsque l’on parle d’entretiens d’observance, de vaccination ou de télémédecine ! Nous l’avons plusieurs fois souligné dans vos colonnes, l’évolution de l’activité des pharmaciens d’officines vers une plus grande part de prestations de services ne peut se faire sans une réorganisation profonde des processus au sein des officines. Il y a un investissement de départ que les pouvoirs publics doivent mesurer à sa juste hauteur.

Vous avez souvent insisté sur l’apport de l’activité générique à la marge brute des officines. Quelles sont vos appréciations de la situation actuelle ?

Christian Nouvel. - Sur la marge apportée par le générique, nous sommes sur un plateau, en espérant qu’il ne s’agit pas du sommet d’une courbe… qui pourrait fléchir vers le bas ! L’alignement du prix de certains « princeps » sur le prix générique avec du « non substituable » est une tendance qui pourrait avoir des effets sur la marge brute : c’est à suivre avec attention !

Quant à l’évolution prévisible de la marge brute en 2020, quelles sont vos premières remontées du terrain ?

Philippe Becker. - Nous publierons dans « le Quotidien du pharmacien » en janvier prochain une première estimation portant sur un panel d’officines ayant clos leur activité entre janvier et septembre 2020. D’une manière générale, et à l’heure où nous parlons, nous n’avons pas de sujets d’inquiétudes sur la marge brute qui nous soient indiqués par notre réseau.

 

Propos recueillis par Marie Bonte - Le Quotidien du Pharamcien

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