Charge déductible, crédit d’impôt, réduction d’impôt : comment s’y retrouver quand on est indépendant ou dirigeant de TPE ?

Lorsque vous engagez des dépenses pour votre entreprise, ces dernières sont généralement déductibles fiscalement.

Mais encore faut-il savoir de quoi l’on parle : charge déductible, crédit d’impôt, réduction d’impôt ?

Ces trois notions sont souvent confondues, alors que leur mécanisme et leur effet sur la trésorerie sont très différents. Faisons le point !

Trois mécanismes fiscaux, trois effets différents

  • La charge déductible agit en amont : elle réduit le bénéfice imposable. Par exemple : si vous réalisez 100 000 € de chiffre d’affaires et avez engagé 30 000 € de charges déductibles, votre impôt ne portera que sur 70 000 €.
  • Le crédit d’impôt agit en aval : il réduit directement l’impôt dû, et si votre impôt est nul, l’État vous rembourse la différence.
  • La réduction d’impôt agit elle aussi en aval, mais elle n’est jamais remboursée. Si vous n’êtes pas imposé, elle reste sans effet. Elle est donc moins puissante que le crédit d’impôt.

Entrons maintenant dans les détails !

Les charges déductibles : les déductions des dépenses au quotidien

La charge déductible est le levier le plus fréquent. Chaque dépense engagée dans l’intérêt de votre activité réduit votre base imposable.

Quelques exemples concrets de charges déductibles :

  • le matériel acheté par un artisan,
  • les frais de déplacement engagés par un consultant,
  • le loyer commercial et les marchandises d’un restaurateur…

Toutes ces dépenses réduisent mécaniquement le bénéfice fiscal et donc l’impôt à payer.

Attention toutefois : la déductibilité est encadrée. La dépense doit être justifiée, proportionnée et directement liée à l’activité. Un ordinateur professionnel se justifie sans difficulté ; l’achat d’un véhicule beaucoup moins si votre activité est sédentaire.

Le cas particulier des amortissements

Lorsque vous investissez dans un bien durable (ordinateur, véhicule, machine, mobilier), sa charge comptable et fiscale est répartie sur plusieurs années.

Cas concret : un médecin libéral investit 5 000 € dans un échographe. Il doit amortir son matériel sur cinq ans, et nous supposons l’amortissement linéaire. Chaque année, il déduira 1 000 € de son résultat, sans débourser un euro supplémentaire. La première année, l’effet est défavorable : son importante sortie de trésorerie n’a occasionné qu’une légère baisse d’impôt. Les années suivantes, l’effet est favorable.

L’amortissement revient donc à lisser l’effet fiscal dans le temps.

NB : Si le bien a été financé par un crédit, les intérêts d’emprunt constituent également une charge déductible, qui s’ajoute à l’amortissement du matériel.

Les crédits d’impôt : transformer vos dépenses en liquidités

Le crédit d’impôt est un mécanisme différent. Il s’impute directement sur l’impôt à payer, et si vous n’êtes pas imposé, l’État vous le rembourse par virement.

Ce caractère remboursable le rend particulièrement attractif pour les TPE en lancement, pas encore rentables, ou peu imposées.

Cas concret : un boulanger recrute un apprenti en CAP. Outre les aides à l’embauche et l’exonération de cotisations sociales, il bénéficie également d’un crédit d’impôt pouvant atteindre 1 600 € par an. Même si son exercice fiscal est déficitaire, l’État lui verse ce montant.

Autre cas : une start-up d’ingénierie conçoit un prototype de capteur connecté. Le projet ne dégage pas encore de bénéfices, mais grâce au Crédit d’Impôt Innovation (CII), l’entreprise obtient un remboursement pouvant aller jusqu’à 20% de la valeur (plafonné à 400 000 € par an) ce qui finance la suite de la R&D.

Ces dispositifs demandent un formalisme particulier et une grande rigueur dans les justificatifs, parfois même un rescrit fiscal dans les cas complexes.

Cependant, s’ils sont bien gérés, ils permettent de convertir une dépense engagée en ressource de trésorerie immédiate : la dépense “coûte moins” immédiatement.

Puisque le crédit d’impôt est le seul mécanisme qui profite aussi aux entreprises non imposées, il doit être prioritaire pour tout dirigeant dont le résultat est faible ou nul, mais souhaite investir dans son activité.

Les réductions d’impôt : un levier surtout patrimonial

La réduction d’impôt ressemble au crédit d’impôt, mais avec une limite de taille : si vous n’êtes pas imposé, elle ne produit aucun effet et elle est perdue.

Voici quelques situations occasionnant des réductions d’impôt

  • souscription au capital d’une PME,
  • dons à des organismes d’intérêt général,
  • investissements productifs dans les DOM,
  • soutien à certains dispositifs culturels.

Ces mécanismes relèvent plutôt d’une stratégie patrimoniale personnelle. Ils intéressent surtout les entrepreneurs imposés à l’impôt sur le revenu (IR) et désireux de diversifier leurs placements tout en réduisant leur fiscalité personnelle.

Cas concret : un dirigeant de TPE au régime de l’IR décide d’investir 20 000 € dans une PME innovante. Il bénéficie d’une réduction d’impôt de 18 %, soit 3 600 € en moins sur son impôt sur le revenu. Cet avantage lui est utile s’il paye au moins 3600 € d’impôts (l’excédent est perdu sinon. Il ne profite pas directement à l’entreprise, seulement à son patrimoine personnel.

Il existe toutefois des rares cas de réduction d’impôt au niveau de l’entreprise. 

C’est le cas par exemple de la réduction d’impôt pour achat d'œuvres d’art ou d’instruments de musique.

Le principe de la réduction d’impôt pour achat d'œuvres d’art

Une entreprise soumise à l’impôt sur les sociétés (IS) ou à l’impôt sur le revenu (IR) peut bénéficier d’une réduction d’impôt égale à 60 % du prix d’acquisition d’une œuvre originale d’un artiste vivant, dans la limite d’un plafond annuel de déduction de 20 000 € ou de 0,5 % du chiffre d’affaires HT si ce montant est plus élevé.

Les conditions

  • L’œuvre doit être originale et acquise directement auprès de l’artiste ou d’un intermédiaire habilité (galerie, marchand d’art).
  • Elle doit être inscrite à l’actif immobilisé de l’entreprise.
  • L’entreprise s’engage à exposer l’œuvre au public, ou à ses salariés, pendant cinq ans (locaux accessibles, hall d’accueil, salle de réunion, etc.).

Exemple : Une PME de services au chiffre d’affaires de 5 M€ achète une sculpture contemporaine pour 20 000 € et l’expose dans son hall d’entrée. Elle peut déduire de son impôt 12 000 € (60 %), répartis par parts égales sur cinq ans, soit 2 400 € par exercice. Ainsi, l'œuvre n’aura réellement coûté que 40% de sa valeur, soit 8 000 €.

Réconcilier le comptable et le financier

Ces notions ne sont pas de simples particularités comptables.

Bien utilisées, elles peuvent devenir un véritable levier stratégique pour investir au bon moment, placer sa trésorerie plus efficacement, négocier des crédits en apportant de meilleures garanties.