Recours aux heures supplémentaires – Du pouvoir de direction… à la modification du contrat de travail

De nombreuses entreprises ont recours aux heures supplémentaires, que ce recours soit ponctuel, structurel, voire systématique.

Dans son principe, lorsque le fonctionnement et les nécessités de l’entreprise l’exigent, l’employeur a la possibilité de faire effectuer des heures supplémentaires au salarié, sous réserve de respecter l’ensemble de la législation applicable à ces heures.

Agissant dans le cadre de son pouvoir de direction, l’employeur est donc en mesure d’imposer la réalisation de ces heures au salarié.

Que se passe-t-il en cas de refus du salarié ?

Tout refus opposé par ce dernier est susceptible de donner lieu à une sanction, voire à un licenciement pour faute grave.

Le juge est venu, à plusieurs reprises, tempérer ce principe lorsque le refus du salarié est exceptionnel et justifié par un délai de prévenance trop court, ou en raison d’un manquement de l’employeur, qui n’aurait pas rémunéré les heures supplémentaires précédemment exécutées, par exemple.

Que se passe-t-il si le recours aux heures supplémentaires est récurrent ?

Dans une affaire récemment soumise à la Cour de cassation, la question posée concerne le refus du salarié d’effectuer des heures supplémentaires récurrentes.

Un salarié est sanctionné, puis licencié pour faute grave pour non respect de l’horaire collectif modifié par l’employeur depuis 2007.

L’employeur imposait, en effet, la réalisation journalière de 50 minutes supplémentaires et avait affiché, au sein de l’atelier, la répartition des nouveaux horaires de travail conduisant ainsi les salariés à réaliser, chaque semaine, des heures supplémentaires.

Dans cette affaire, l’employeur avait considéré que la modification de l’horaire collectif relevait d’une prérogative de l’entreprise et qu’elle s’imposait aux salariés.

Malgré cela, un salarié s’oppose au changement d’horaires et quitte son poste de travail à 16h30 au lieu de 17h20. Cette attitude conduira l’entreprise à prendre la décision de mettre un terme au contrat de travail de ce salarié.

Ce denier, contestant les sanctions et la rupture de son contrat de travail engage une action et la Cour d’appel, suivie par la Cour de cassation, considère que le recours systématique de l’entreprise aux heures supplémentaires, portant la durée hebdomadaire du temps de travail à 39 h au lieu de 35 h comme le prévoyait le contrat de travail du salarié, emportait modification de celui-ci. L’accord du salarié était donc requis.

Le refus opposé par le salarié à la modification de son contrat de travail n’est donc pas fautif.

Pour la Cour de cassation, le contrat de travail constitue la limite au pouvoir de direction et d’organisation de l’employeur, dans la mesure où l’augmentation du temps de travail (tout comme la diminution du temps de travail) suppose l’accord du salarié.

Que faut-il retenir de cette décision ?

Au-delà des problématiques liées au contingent d’heures supplémentaires ou aux repos, cette décision permet de cerner les risques d’un recours récurrent aux heures supplémentaires. Les employeurs dans cette situation pourraient, a minima se voir opposer un refus des salariés. Pour aller plus loin, il n’est pas à écarter une impossibilité de supprimer des heures supplémentaires si elles sont récurrentes dans la mesure où les salariés concernés pourraient estimer que la durée du travail a été modifiée à la hausse.

Dans ce contexte, Il convient de dresser un bilan sur les mesures à entreprendre. Elles peuvent se traduire par une volonté d’augmenter la durée du travail des salariés par avenant au contrat de travail, de recourir à un nouveau mode d’aménagement du temps de travail...

Arrêt de la Cour de cassation, ch Sociale, du 08.09.2021, n° 19-16.908

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